Je regardais le ciel épais*. Epais comme un miroir dans l'obscurité, lourd comme mon pas hésitant. Tout était obturé, fermé aux quatre coins du lieu. C'était pourtant une journée d'été. Je voyais ce ciel lourd. La maison était chaude, envahie de canicule. Je décidai de sortir, de quitter un abri devenu inconfortable. La campagne, blessée
Une barque une eau bleue Soudain les souvenirs d'un bain qui aurait dû me baptiser Aucune main ne m'a guidée jusqu'à la source que je n'ai pu atteindre Lui c'est le lierre qui unit le bord du lit au fleuve apaisé dans une danse flottée Nous aurons manqué les rendez-vous au fil de l'eau
Ce qui compte c'est tenir la main des saisons c'est le ciel du matin dessiné sur ma joue Et puis aimer l'amour s'accrocher à nos rides comme à un sourire Ce qui compte c'est gober le fruit poussé par surprise au bord de l'âme des choses
Toi tu veillais près du vent tu parlais un peu haché un peu happé Tu marchais foulais toutes les terres proches ou lointaines froides ou chaudes Tu éparpillais les ailes des papillons qui se posaient sur ta main parce qu'elles gênaient trop fines trop transparentes liées à trop de sensations fignolées comme des œuvres d'art
Je regarde le jardin J'entends le vent Je vois les arbres, leurs branches en partance Comme un déchaînement de petites forces un va et vient dansant sur fond bleu Le vent aujourd'hui irise de bleu limpide Pas de plainte triste mais des formes dynamiques frôlant les espaces des oiseaux qui ce matin racontent la journée
Je suis chemin, arbre et verdure Je fraye contre le bois des haies bois le sérum qui s'écoule des feuilles encore fraîches Je me protège des tempêtes internes des vagues de désir enfouies sous des chaleurs qui montent du ventre brûlent la gorge et font pleurer les paupières des rivières
Ecrit à partir de vingt huit mots tirés de "Rien que la vie" - Alice Munro Le repos me rendait immobile. La rudesse des opinions prononcées avait agi sur mes nerfs. De nouvelles sensations, pourtant, me semblaient en accord avec de vieux poncifs que nombre de parents profèrent à leurs enfants. Brusquement, je fus consciente